Immersion “Cacao Quest” à Uccle : une journée de théâtre, de débat et de réflexion autour du commerce équitable

16 octobre 2025In Articles

À l’occasion de la Semaine du commerce équitable 2025, les étudiants du bachelier en Commerce et Développement de la Haute École Bruxelles-Brabant (HE2B) ont participé à une journée mêlant art, débat et pédagogie active, centrée sur la pièce Cacao Quest, née d’une collaboration entre le Trade for Development Centre d’Enabel et la compagnie Tadam. L’objectif : faire réfléchir la jeunesse sur les réalités de la filière cacao et, plus largement, sur la portée de nos choix de consommation dans un monde globalisé.

Cacao Quest : un outil pédagogique et ludique sur le commerce équitable

Le lancement de Cacao Quest s’inscrit dans la Semaine du commerce équitable, organisée du 1er au 11 octobre 2025. Coordonnée par le Trade for Development Centre d’Enabel, cettecampagne annuelle mobilise les citoyens autour d’une multitude d’évènements qui mettent à l’honneur le commerce équitable et ses produits à travers toute la Belgique.  La pièce, destinée aux élèves de l’enseignement secondaire à partir de 16 ans, est une initiative artistique et pensé comme un outil pédagogique pour les publics scolaires.

Répondant à un appel au marché du TDC, la compagnie Tadam a imaginé un spectacle à la fois accessible, rythmé et porteur de sens. Le metteur en scène Grégory Bracco, coauteur avec Philippe Rasse, raconte que la première difficulté de « cette grande aventure » a été de rendre le sujet attractif :

« L’un des premiers défis, c’était d’écrire quelque chose qui puisse vraiment intéresser les ados. À partir du moment où on nous demande d’écrire une pièce sur la culture du cacao en Côte d’Ivoire, disons-le, ce n’est pas le sujet le plus funky. Et quand on s’adresse à des élèves de cinquième ou sixième secondaire, on se demande tout de suite : comment les captiver avec une thématique qui reste assez de niche ? »

Pour capter leur attention, la compagnie de théâtre a choisi la fiction. La pièce plonge le spectateur dans un futur proche où le chocolat est devenu un produit de luxe, réservé à quelques privilégiés, et où trois adolescents se retrouvent embarqués dans une affaire de contrebande. Grégory Bracco nous explique : « Il fallait trouver une idée qui accroche. On a donc décidé de faire une dystopie, une uchronie : on change un élément du présent pour imaginer un futur possible où ces trois ados vivent une sorte d’aventure, presque un thriller, autour d’une contrebande de chocolat »

Plus qu’une pièce d’aventure et de comédie, Cacao Quest a répondu au défi d’aborder en profondeur les grands enjeux de la filière : la déforestation, le travail des enfants, le commerce équitable, la durabilité et l’agroforesterie.

Des échanges riches entre experts et étudiants

À la suite de la représentation, un débat animé par François Xavier Dubuisson, coordinateur du bachelier en Commerce et Développement (HE2B), a permis de prolonger la réflexion.
Sur scène, Samuel Poos, project manager au Trade for Development Centre (Enabel), le cofondateur du magasin OZFair, Guerric Gautier, partenaire du lunch équitable, ainsi que les acteurs et le metteur en scène étaient présents pour répondre aux questions du public.

 

L’échange, d’une durée d’environ quarante minutes, s’est révélé riche et diversifié. Il a offert un véritable espace de réflexion libre, dans la continuité et la complémentarité de la pièce, donnant ainsi tout son sens à la dimension pédagogique et participative de Cacao Quest.

Samuel Poos a apporté un éclairage technique et concret sur la filière cacao en Côte d’Ivoire. Il a par exemple expliqué aux spectateurs qu’une grande partie des producteurs sont regroupés en coopératives. Il a également abordé la question cruciale des prix et du rapport de force avec les acheteurs : « En Côte d’Ivoire, le marché du cacao n’est pas libéralisé : le prix d’achat aux producteurs est fixé par l’État. Quand ce prix augmente, cela a un impact positif sur tout le monde, pas seulement sur les filières équitables. » Et d’ajouter, sur un ton plus critique : « Les industriels ne veulent pas de cacao de haute qualité provenant de Côte d’Ivoire: ils veulent pouvoir acheter à un prix très bas. Le marché mondial est organisé en fonction de ce qui est attendu par les acheteurs. »

Guerric Gautier, du magasin OZFair situé à Saint-Gilles, a évoqué la réalité du commerce équitable de proximité : « Nous, on est vraiment le dernier relais entre producteurs et consommateurs. On a fondé notre coopérative il y a dix-huit ans pour proposer au quotidien un maximum de choix et montrer qu’il est possible de trouver des produits de qualité issus de filières Fairtrade. »  Il insiste sur la nécessité de garder le lien entre le consommateur et le producteur : « Essayer de mieux répartir entre le prix de vente ici et ce que reçoit le producteur là-bas, c’est une valeur essentielle pour que le monde aille un peu mieux demain. »

Conscient des nouveaux défis, il alerte aussi les étudiants sur la concurrence du commerce en ligne : « Le grand défi aujourd’hui, c’est l’explosion de l’ e-commerce. Il y a très peu de commerce équitable sur internet, et ça met en danger les magasins de détail comme le nôtre. Mais on reste optimiste : si chacun consacre ne fût-ce que cinq ou dix euros par an à des produits équitables, on fait déjà bouger les lignes. »

Une expérience d’apprentissage complète

Après un déjeuner proposé par OZfair, la journée s’est prolongée avec la participation des étudiants au jeu Homo Responsabilis cacao, développé par Groupe One, un outil pédagogique basé sur la pédagogie active. À travers une simulation de gestion d’entreprise, les étudiants en bachelier ont pu expérimenter les choix économiques et mesurer leur impact sur les plans social et environnemental.

Ce jeu complète parfaitement la démarche de Cacao Quest : il transforme la réflexion théorique en expérience vécue et permet aux étudiants de mettre en pratique les réflexions entamées dans la matinée. En combinant le plaisir du théâtre, la force du débat et l’apprentissage par la pratique, cette immersion a démontré la richesse des approches croisées pour sensibiliser les jeunes aux réalités du commerce équitable.

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