Commerce équitable et climat

8 personnes sur 10 à travers le monde considèrent le changement climatique comme une menace majeure pour leur pays. Son impact se fait de plus en plus sentir à l’échelon planétaire, mais pas dans la même mesure partout. Pour l’heure, ce sont les personnes les moins responsables de la crise qui en subissent le plus lourdement les conséquences. Il s’agit bien souvent de petit·es exploitant·es agricoles du Sud et de leurs communautés déjà grandement vulnérables.

Quelque 500 millions de petites exploitations agricoles produisent environ 80 % de la nourriture consommée à travers le monde. Le commerce équitable permet à ces personnes de faire face aux changements de circonstances. Voire de se prémunir contre des situations pires encore.

De quelle manière?

  • Le commerce équitable leur fournit un revenu largement suffisant pour vivre et, dans le même temps, investir dans des arbres d’ombrage, de l’énergie durable…
  • Les partenaires équitables apportent leurs connaissance et expérience en matière d’adaptation au changement climatique. En bref, la justice climatique et la justice sociale sont étroitement liées.

Le changement climatique amplifie les inégalités

Le changement climatique amplifie les inégalités à travers le monde. C’est ce qu’a de nouveau confirmé une enquête de qualité menée par l’EFTA (European Fair Trade Association) au printemps 2021.

Le changement climatique a un impact direct sur la production agricole dans le Sud et, par voie de conséquence, sur les communautés qui en dépendent. Les agriculteur·rices sont moins à même de planifier les semailles et les récoltes et doivent appliquer de nouvelles techniques, les cultures souffrent davantage de maladies et de parasites, etc. Concrètement, un représentant de la coopérative péruvienne de café Norandino témoigne devant l’EFTA que, même sur les parcelles les plus basses des agriculteur·rices, les températures relevées sont déjà trop élevées pour y cultiver du café.

Les producteur·rices n’ont donc pas d’autre choix que de s’adapter ou de disparaître. Garantir leurs revenus revient dès lors à changer leur mode de fonctionnement en tenant compte d’épisodes plus intenses de sécheresse et de précipitations, ainsi que de la hausse des températures. Mais cela requiert tant des ressources financières que des connaissances. Or, pour nombre d’entre eux elles, c’est là un objectif inatteignable au sein d’un marché international injustement organisé.

Force nous est de constater que les producteur rices agricoles qui n’y ont pas accès renoncent à l’agriculture et migrent vers les villes pour y trouver un revenu.

Le commerce équitable lutte contre les inégalités

Le commerce équitable est connu comme un système qui garantit aux producteur·rices un revenu équitable. Mais un produit équitable doit également répondre à une kyrielle de critères sociaux et environnementaux. Qui plus est, les organisations de producteur·rices certifiées équitables s’engagent à réaliser des investissements bénéfiques pour l’ensemble de la communauté. Dans la pratique, il s’agit souvent de mesures climatiques comme le reboisement, la culture de variétés autochtones, la transition vers des techniques agricoles protégeant la biodiversité, etc.

Le commerce équitable donne aux producteur·rices un revenu stable et partant, les moyens pour procéder aux investissements nécessaires, tout en leur apportant les connaissances et des conseils, et en unissant leurs forces de sorte à influencer la politique. Ce faisant, le commerce équitable jette un pont entre l’aspect économique, le volet social et la problématique du climat.

La justice climatique et la justice sociale sont indissociables

C’est le message martelé actuellement par la campagne internationale « Let’s do it fair » : le respect du climat et la justice sociale sont deux voies menant au même objectif et ne pouvant être considérées distinctement. Diverses organisations européennes de commerce équitable, dont l’organisation belge Oxfam-Magasins du monde, se rallient derrière cette campagne, dans la perspective du Sommet des Nations Unies sur le climat (COP26) qui se tiendra en novembre prochain. « La crise climatique réclame davantage de justice sociale et économique dans tous les pays et des mesures politiques, et ce, en termes de commerce aussi », affirme-t-elle.

Le mouvement international du commerce équitable appelle lui aussi les leaders mondiaux à prendre également en compte l’aspect « commerce » dans les nouveaux accords climatiques conclus. Et les signataires de ce position paper de poursuivre : « La durabilité tant sociale qu’environnementale est indispensable pour garantir le fonctionnement de modèles réellement durables et pour concrétiser les transitions nécessaires à la réalisation des ODD et de l’Accord de Paris sur le climat ».

« La voix des petit·es exploitant·es agricoles est d’une importance cruciale pour résoudre la crise climatique à l’échelon mondial. Raison pour laquelle le mouvement du commerce équitable appelle la communauté internationale à écouter leur avis et à tenir compte de la réalité des petit·es producteur·rices dans la problématique climatique », ajoute Juan Pablo Solís de Fairtrade International.

Les produits équitables viennent souvent de loin, comment cela peut-il être bénéfique pour le climat ?

Voilà bien un commentaire fréquemment entendu dans la bouche des consommateurs et consommatrices. Le nombre de kilomètres parcourus par un produit pour atteindre son ou sa consommateur·rice final·e est bien souvent considéré comme l’étalon par excellence de la durabilité. Et pourtant, il s’agit là d’une vision trop étriquée.

Comment cela ? Pour la majorité des denrées alimentaires, les émissions de CO2 produites par le transport ne représentent en fait que 10 % du total, et ce, même en cas de transport transcontinental. Par contre, la manière dont un produit est cultivé et transformé a un impact bien plus significatif sur les émissions totales.

Une étude menée en 2018 a ainsi comparé l’empreinte écologique des roses équitables provenant du Kenya à celui des roses conventionnelles produites aux Pays-Bas. Conclusion ? Les roses cultivées en serre aux Pays-Bas accusaient une empreinte écologique nettement supérieure à leurs homologues kenyanes, alors même que ces dernières étaient acheminées en avion. (Recherche d’informations sur les effets environnementaux des aliments, Katajajuuri, Pulkkinen et Hartikainen / Luke, 2018).

Durable ne rime pas nécessairement avec local, et inversement. Les produits équitables et ceux produits localement et de façon écologique sont deux manières complémentaires d’adopter une consommation plus durable.

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Photo: Biodiversity international